Autonomie VS réseaux

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Pour confronter l’architecture à la question de consommation énergétique, il convient de faire la distinction entre sa construction et son habitation. Il apparait comme évident  que la première notion doit faire l’objet d’une réflexion globale en terme de choix de matériaux et de procédés et se concevoir comme un investissement, au regard de la durée de vie du  bâtiment. En ce qui concerne son utilisation, son habitation, on envisage la consommation d’énergie comme une résultante des qualités du bâtiment. On entend donc comme critère de qualité la faible consommation d’énergie voir une production de cette dernière, c’est sur ce point que nous nous attarderons.

La question de l’énergie pour « utiliser » l’architecture est souvent caricaturée par le panneau solaire: il incarne la maison qui consomme peu « au regard limité de la facture annuelle de fluides » . Cette banalité est également encouragée par les règlementation HQE, RT 2020 et autres qui tendent vers des bâtiments à énergie positive. Cette notion de production d’énergie (électrique notamment) des logements semble une erreur, du moins pour la situation française.

Depuis le début du XXème siècle, la France a fait un effort considérable pour mettre en place des réseaux de transports des fluides de qualité à l’échelle nationale. La vision qui consiste à produire individuellement l’électricité va à contre courant de la logique à l’échelle nationale. En terme de consommation, cette démarche ne diminue pas les besoins d’énergie, elle limite simplement son achat extérieur. On va même jusqu’à obliger EDF à acheter la surproduction individuelle, quantité dont l’entreprise n’a pas besoin, encore moins au prix imposé… dans le but de promouvoir ce genre d’initiatives écologiques…

Dans quel but veut-on rendre autonome une maison déjà alimentée en eau, gaz et électricité? Délocaliser la production ne fera pas baisser la consommation, cela peut même créer des problèmes bien plus important à long terme. En effet, le panneau solaire acheté par un particulier pour poser sur le toit de son pavillon aura sans doute des retombées lourdes en terme d’impact écologique quand il aura un rendement moindre dû à un mauvais entretien; qu’il faudra le recycler au mieux au terme de la moitié  de sa durée de vie supposée… La gestion individuelle de cette production pose des problèmes de retombées globales en matière d’énergie grise et d’économie. Si le dispositif s’étend largement, EDF ne pourra plus racheter l’énergie produite aux prix actuels, l’investissement du particulier ne vaudra alors plus la peine.

S’il convient de progressivement basculer la production énergétique vers le renouvelable, celle-ci doit, il me semble, rester entre les mains d’acteurs plus importants que les particuliers. Il faut ainsi continuer à penser en terme de réseaux, du producteur au consommateur même s’il existe des exceptions notables ou l’autonomie énergétique doit être envisagée (si les déperditions de réseaux sont trop importantes dues à l’isolement par exemple). L’Allemagne travaille intensément sur la méthanisation et son application aux réseaux: l’éléctricité est stockée sous forme de gaz synthétique, à l’intérieur des réseaux de gaz naturel: on a ainsi une solution qui réuni tous les facteurs: une production propre et renouvelable, une utilisation des réseaux déjà en place, un stockage possible à grande échelle. Le regroupement de la production d’énergie me parait, de plus, questionner l’architecture en terme d’échelle, comme le font déjà certains  ouvrages d’arts  monumentaux et certains projets de protections contre les crues en Hollande notamment.

Le principal objectif, en matière de consommation d’énergie des bâtiments, est donc de limiter les dépenses, plutôt que de créer ses propres ressources. A ce titre, les propositions de NégaWatt sont intéressantes. Les solutions d’une consommation limitée ne sont pour autant pas toutes l’exclusivité des architectes: si l’isolation par l’extérieur est une solution efficace et simple pour limiter les déperditions thermiques, le pull en est une autre, à une échelle plus réduite: celle du corps humain…



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